PARUTIONS
LIVRES

La sexuation des enfants

Travaux de l'Institut psychanalytique de l'Enfant

H. Damase, D. Roy, L. Sokolowsky (dir.)
Références
La sexuation des enfants
H. Damase, D. Roy, L. Sokolowsky (dir.)
Éditeur
Navarin éditeur
Pages
224
Année
2021
prix
15 €
Hélène Bonnaud
  • Ouverture

    La distinction sexuée – Laura Sokolowsky & Hervé Damase

    La sexuation, une avancée lacanienne

    À l’épreuve du réel – Laura Sokolowsky
    L’enfant dans le discours sexuel – Daniel Roy
    Le genre, ça n’ex-siste pas – Hélène Bonnaud

    Être sexué, une aventure d’enfance

    Logique inconsciente du choix sexué
    L’Œdipe, s’en passer, s’en servir – Patricia Bosquin-Caroz
    Retour sur le complexe de castration – Jean-Robert Rabanel

    Les dires infantiles du sexe
    Libérer la place du désir – Angèle Terrier
    Cas : Si mon cœur ne me dit rien – Maria Torres Ausejo
    Contingence d’une sexuation – Clotilde Leguil
    Cas : Je vais chez les filles – Anaïs Potiron
    Dys-tinguer le sexe – Angèle Terrier
    Cas : Oups – Carine Thieux

    Le dit qui secourt

    Introduction – Nicole Borie

    Surgissements du sexuel en institution

    L’insondable choix du sexe – Dominique Holvoet
    Accueillir les corps meurtris – Marie-Cécile Marty
    Effractions de jouissance – Jean-Robert Rabanel
    Robert ou l’invention d’un corps – Michel Héraud

    Se nommer fille ?
    Inventer une limite – Alexandre Stevens
    Cas : Un pli pour un nouage – Isabelle Magne
    Une (re)marque grammaticale – Christine Maugin
    Cas : Nonpareille – Léna Burger

    Différence sexuelle et altérité

    Destins de la sexuation
    Par la grâce du symptôme – Esthela Solano-Suárez
    L’Homme aux loups et la question du genre – Agnès Aflalo

    L’identification sexuelle en question
    Middlesex – Virginie Leblanc
    Percer l’énigme – Clotilde Leguil
    Cas : Sortir du flou – Solenne Daniel

    L’enfant trans et ses impossibles

    Du malentendu à la question – François Ansermet
    L’enfant trans et ses énoncés – Ève Miller-Rose
    Enfants trans en Argentine – Silvia Tendlarz
    Les questions des enfants trans – Éric Laurent

    La sexuation avec ou sans fin

    Fant’homme – Guy Poblome
    Les signifiants d’une sexuation – Laurent Dupont & Guy Poblome

    Postface

    Réveil – Daniel Roy

  • Pour chaque enfant, fille ou garçon, la différence sexuelle fait question. La « fluidité des genres » s’imposerait-elle comme une nouvelle norme au nom d’une liberté de chacun à choisir son propre sexe ? La mode de l’unisexe et la dénonciation du sexe d’assignation suffisent-elles à donner plus de marge de manœuvre aux enfants dans le choix d’une position sexuée ? Face à l’impasse du sexuel, comment se repérer ?

    Lacan emploie le terme de sexuation pour différencier le sexe comme donnée biologique et sa subjectivation par un être parlant. La sexuation est le processus par lequel l’enfant se découvre, se reconnaît et se parle comme étant d’un sexe ou d’un autre, « couleur d’homme » ou « couleur de femme ».

    Être sexué semble ainsi livrer à toutes sortes de déterminations. Mais cela reste pour chaque enfant, chaque jeune, chaque adulte, une aventure absolument singulière, qui peut conduire à rencontrer un(e) psychanalyste.

    Prenant au sérieux ces déterminations, l’analyste peut en desserrer l’étau avec l’enfant. Le jeu de la langue leur donne la liberté d’interroger autrement les discours de la tradition aussi bien que les nouveaux stéréotypes tels qu’ils se condensent autour de « l’enfant trans ».

    Ce livre éclaire ces questions par des textes concis, recherches et cas actuels, discutés à plusieurs voix :
    Agnès Aflalo, François Ansermet, Hélène Bonnaud, Nicole Borie, Patricia Bosquin-Caroz, Léna Burger, Hervé Damase, Solenne Daniel, Laurent Dupont, Dominique Holvoet, Éric Laurent, Virginie Leblanc, Clotilde Leguil, Isabelle Magne, Marie-Cécile Marty, Christine Maugin, Ève Miller-Rose, Guy Poblome, Anaïs Potiron, Jean-Robert Rabanel, Daniel Roy, Laura Sokolowsky, Esthela Solano-Suárez, Alexandre Stevens, Sylvia Tendlarz, Angèle Terrier, Carine Thieux, Maria Torres Ausejo.

    L’Institut psychanalytique de l’Enfant du Champ freudien, créé en 2009 par Jacques-Alain Miller, publie régulièrement ses travaux chez Navarin éditeur et ses recherches sur son site www.institut-enfant.fr

  • On ne naît ni fille ni garçon, on le devient

     

    Le 24 novembre 2021, Hélène Bonnaud était l’invitée de Marie Sorbier, journaliste et productrice de l’émission de France Culture Affaire en cours. À l’occasion de la parution du volume de l’Institut psychanalytique de l’enfant du Champ freudien, ce fut une ouverture – en 6 minutes ! – sur le thème brûlant d’actualité de La sexuation des enfants.

    Adopter son sexe

    Le psychanalyste français Jacques Lacan emploie le terme de « sexuation » pour différencier le sexe comme donnée biologique et sa subjectivation par un être parlant. La sexuation est donc le processus par lequel l’enfant se découvre et se reconnait comme étant femme ou homme. Dans l’ouvrage collectif La sexuation des enfants, paru chez Navarin, on lit en introduction « Les médias et les réseaux sociaux diffusent en continue de nouveaux stéréotypes marqués par l’ambiguïté sexuelle ; la fluidité des genres est désormais prônée comme un nouvel idéal. »

    Selon la psychanalyste Hélène Bonnaud, pour Jacques Lacan, « L’anatomie ne donne pas la réponse à la question du sexe ». En effet, l’être humain est soit homme soit femme et cela se détermine à la naissance. Toutefois, le sujet, c’est-à-dire l’enfant, ne se découvre garçon ou fille que dans un processus qui dure un certain temps en se questionnant sur sa sexualité.

    On adopte son sexe, on consent à habiter le corps qu’on a et, évidemment, cela passe par des opérations imaginaires et symboliques qui ne sont pas toujours simples. Ce n’est pas forcément une évidence immédiate pour l’enfant d’être un garçon ou une fille. 

    « On ne naît ni fille ni garçon, on le devient »

    Devenir fille ou garçon se fait d’une façon qui ne se perçoit pas toujours ; ce n’est pas systématiquement des manifestations de refus ou d’acceptation de son genre. Ce sont des processus inconscients qui ont été décrits par Freud et ensuite par Lacan.

    Le petit garçon, au moment de l’éveil de sa sexualité, se demande ce qu’il se passe dans son corps. Il n’a pas les moyens symboliques pour comprendre ce qu’il se passe au moment d’une érection. Cela peut tout à fait être une rencontre traumatique pour lui avec son sexe. 

    Par ailleurs, le genre neutre aujourd’hui signifie que l’on refuse qu’il y ait un binarisme. Jusqu’à récemment, la sexualité était alors pensée comme une différence, comme ce qui se repère de fondamentalement différent au niveau du corps. Ainsi, le genre neutre témoigne du fait qu’on ne se reconnait pas dans cette différence, ni dans l’un ni dans l’autre. Selon Hélène Bonnaud, c’est une façon de contester ce binarisme et de refuser la jouissance telle qu’elle se commet pour l’homme et pour la femme.

    La fluidité du genre : un phénomène de mode ?

    Pour Hélène Bonnaud, le discours de la fluidité du genre prend de l’ampleur en soutenant que toute la théorisation de la sexualité avec ce couple homme femme n’est plus opératoire ; et cela introduit l’idée qu’il existe de multiples façons d’occuper la place d’une femme et d’un homme.

    Les psychanalystes ne sont pas étonnés et ont depuis longtemps repéré qu’être un homme et être une femme cela n’est pas facile, cela n’est pas une donnée immédiate : On le devient. Même lorsqu’on occupe cette place dans sa tête on rencontre des tas de symptômes, des tas de difficultés ne serait-ce que dans le couple ou dans la façon dont on se présente ou dans la façon dont on se sent homme ou femme. Tout cela n’est pas écrit à l’avance car nous sommes des êtres parlants et nous n’avons pas d’inscriptions instinctuelles de ce que c’est qu’un homme et une femme. 

    La désignation du genre ne suffit pas à répondre à la question « Qui suis-je ? ». En effet, d’après Hélène Bonnaud, être femme ou être homme n’est pas fixé au point d’appartenir à une norme féminine ou masculine. Les corps, les idéaux, les manières de se sentir femme ou homme changent et apparaissent au grand jour. Autrefois, l’être humain était assujetti à occuper un certain mode d’être dans la façon de paraître, de parler, de s’habiller, de se comporter ; mais aujourd’hui, il peut y avoir une indifférenciation entre une femme et un homme. Enfin, pour Hélène Bonnaud, la fluidité du genre révèle le malaise actuel car les identifications sont moins fortes, plus évasives et complexes et cela est plus difficile de s’y retrouver comme femme ou comme homme.

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