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- D’une époque sans nom, liminaire – Christiane Alberti
- Ce qui ne peut se dire – Jacques-Alain Miller
L’amour du prochain – Jacques-Alain Miller
L’horrible bête faite pour la nuit – Aurélie Pfauwadel
L’usure « manifeste », métaphore de « l’infamie de fait » – Giacomo Todeschini
Topologie des marges – Julia Peker
Lacenaire, a-temporel – Francesca Biagi-Chai
Bas-fonds avec spectateur : Londres, 1751-1891 – Jean-Pierre Naugrette
Une histoire baroque, par Borges – Dominique Corpelet
Boulgakov/Staline : lettres étranges – Hervé Castanet
L’Histoire comme voyage vertical – Entretien avec Anne-Emmanuelle Demartini
Les lumières de la ville – Gérard Wajcman
Le suçotement – Samuel Lindner
Suçotement et sexualité : de Lindner à Freud – Niels Adjiman
Pour un Retour à Baudelaire – Virginie Leblanc
Cy Twombly avec Roland Barthes – Romain Aubé
La menace est invisible – Luc Garcia
Sur un Dictionnaire Apollinaire – Philippe Hellebois
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« Les bas-fonds ». L’expression appelle d’emblée l’imaginaire qui les constitue : l’envers d’une société, sa part maudite réelle ou fantasmée. À l’époque de toutes les ségrégations, quel rapport entretenons-nous avec la part sombre, voire menaçante de l’humanité ? La psychanalyse propose de se déprendre de ce qui fascine dans la pauvreté, le crime, les misérables, etc., pour dénuder le statut de l’objet « rebut ». Ornicar ? 55 cherche à apprendre de la lumière des bas-fonds.
Pourquoi « Les bas-fonds » ? Disons-le d’emblée, un tel titre a de quoi surprendre le lecteur d’Ornicar ? La topographie des profondeurs n’est pas de mise en psychanalyse dès lors qu’on se repère à la structure de langage et à la fonction de la parole. L’inconscient, en effet, n’habite pas le fond de l’âme, ne se confond pas avec le secret ou l’intime, mais s’attrape au contraire à la surface, au ras du discours, dans nos lapsus, nos symptômes, nos manières d’aimer et de jouir. Car il n’y a pas de métalangage, seulement le langage concret que parlent les gens, selon une expression de Lacan que j’affectionne.
Que seraient les bas-fonds sans Les Misérables, qui en ont formé la représentation la plus aboutie ? Décrypter la fabrication d’un tel regard et construire l’histoire de cet imaginaire, c’est ce dont a fait œuvre le regretté Dominique Kalifa avec son livre incontournable, Les Bas-fonds. Gueux, mendiants, prostituées, criminels, aliénés, bagnards… à nous conter l’histoire de ces figures réelles ou fantasmées, il donne à entendre qu’elles n’ont jamais cessé de fasciner. C’est aussi un nom d’époque, celle de l’Europe bouleversée du XIXe siècle. Pour autant, les histoires, la vie des hommes dits « infâmes » ont-elles cessé de nous hanter ? Le contexte n’est plus celui des « mystères » de Paris, mais le débat sur les bas-fonds de notre société n’a pas cessé. Simple rémanence sous de nouveaux noms : SDF, invisibles, vies minuscules, etc. ?
Plus la description de la misère humaine est pathétique, plus elle fait vibrer. Comment ne pas apercevoir aujourd’hui qu’il s’agit de regard, d’un regard qui se jouit ?
Les invisibles, les sans-papiers, les sans-domicile-fixe ne sont pas équivalents au peuple des bas-fonds. Et les clichés sordides ou héroïques de l’univers gris des banlieues ne permettent pas davantage d’attraper de façon unitaire l’expérience des marges.
Les bas-fonds d’aujourd’hui sont ceux de la dérision et du cynisme de la jouissance, quand le triomphe des objets a pulvérisé tous les semblants de la modernité.
Les bas-fonds nous concernent. Ils disent qu’au fondement de la réalité sociale, il y a la prise du symbolique qui s’exerce jusqu’au plus intime de l’organisme humain.
Christiane Alberti
Les bas-fonds
208
2021
18 €
« Les bas-fonds ». L’expression appelle d’emblée l’imaginaire qui les constitue : l’envers d’une société, sa part maudite réelle ou fantasmée. À l’époque de toutes les ségrégations, quel rapport entretenons-nous avec la part sombre, voire menaçante de l’humanité ? La psychanalyse propose de se déprendre de ce qui fascine dans la pauvreté, le crime, les misérables, etc., pour dénuder le statut de l’objet « rebut ». Ornicar ? 55 cherche à apprendre de la lumière des bas-fonds.
Pourquoi « Les bas-fonds » ? Disons-le d’emblée, un tel titre a de quoi surprendre le lecteur d’Ornicar ? La topographie des profondeurs n’est pas de mise en psychanalyse dès lors qu’on se repère à la structure de langage et à la fonction de la parole. L’inconscient, en effet, n’habite pas le fond de l’âme, ne se confond pas avec le secret ou l’intime, mais s’attrape au contraire à la surface, au ras du discours, dans nos lapsus, nos symptômes, nos manières d’aimer et de jouir. Car il n’y a pas de métalangage, seulement le langage concret que parlent les gens, selon une expression de Lacan que j’affectionne.
Que seraient les bas-fonds sans Les Misérables, qui en ont formé la représentation la plus aboutie ? Décrypter la fabrication d’un tel regard et construire l’histoire de cet imaginaire, c’est ce dont a fait œuvre le regretté Dominique Kalifa avec son livre incontournable, Les Bas-fonds. Gueux, mendiants, prostituées, criminels, aliénés, bagnards… à nous conter l’histoire de ces figures réelles ou fantasmées, il donne à entendre qu’elles n’ont jamais cessé de fasciner. C’est aussi un nom d’époque, celle de l’Europe bouleversée du XIXe siècle. Pour autant, les histoires, la vie des hommes dits « infâmes » ont-elles cessé de nous hanter ? Le contexte n’est plus celui des « mystères » de Paris, mais le débat sur les bas-fonds de notre société n’a pas cessé. Simple rémanence sous de nouveaux noms : SDF, invisibles, vies minuscules, etc. ?
Plus la description de la misère humaine est pathétique, plus elle fait vibrer. Comment ne pas apercevoir aujourd’hui qu’il s’agit de regard, d’un regard qui se jouit ?
Les invisibles, les sans-papiers, les sans-domicile-fixe ne sont pas équivalents au peuple des bas-fonds. Et les clichés sordides ou héroïques de l’univers gris des banlieues ne permettent pas davantage d’attraper de façon unitaire l’expérience des marges.
Les bas-fonds d’aujourd’hui sont ceux de la dérision et du cynisme de la jouissance, quand le triomphe des objets a pulvérisé tous les semblants de la modernité.
Les bas-fonds nous concernent. Ils disent qu’au fondement de la réalité sociale, il y a la prise du symbolique qui s’exerce jusqu’au plus intime de l’organisme humain.
Christiane Alberti
- D’une époque sans nom, liminaire – Christiane Alberti
- Ce qui ne peut se dire – Jacques-Alain Miller
L’amour du prochain – Jacques-Alain Miller
L’horrible bête faite pour la nuit – Aurélie Pfauwadel
L’usure « manifeste », métaphore de « l’infamie de fait » – Giacomo Todeschini
Topologie des marges – Julia Peker
Lacenaire, a-temporel – Francesca Biagi-Chai
Bas-fonds avec spectateur : Londres, 1751-1891 – Jean-Pierre Naugrette
Une histoire baroque, par Borges – Dominique Corpelet
Boulgakov/Staline : lettres étranges – Hervé Castanet
L’Histoire comme voyage vertical – Entretien avec Anne-Emmanuelle Demartini
Les lumières de la ville – Gérard Wajcman
Le suçotement – Samuel Lindner
Suçotement et sexualité : de Lindner à Freud – Niels Adjiman
Pour un Retour à Baudelaire – Virginie Leblanc
Cy Twombly avec Roland Barthes – Romain Aubé
La menace est invisible – Luc Garcia
Sur un Dictionnaire Apollinaire – Philippe Hellebois