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Préface
Christiane AlbertiManuscrits de Jacques Lacan
Le carnet des rêves
Mise en question du psychanalyste
Lettre à un jeune ethnologuePrésentations cliniques
Présentation de Mlle Boyer
Présentation de Mme SoledoDocuments & correspondances
Alquié • Althusser • Aubert • Fellini • Foucault • Heidegger Jakobson • Klein • Lévi-Strauss • Paulhan • Wahl
À son père ; à son frère Marc François Lacan ; de Laurence BatailleLa famille
Ce que fut pour moi Jacques Lacan – Thibaut Lacan
Le bureau de mon père – Judith Miller
L’apparition – Cyril Roger-Lacan
Une photographie – Fabrice Roger-Lacan
« Difficile autant que rare » – Ève Miller-Rose
Le mari de ma grand-mère – Sandra Basch
Au jardin d’Lacan, de bricolages en trouvailles – Luc Miller
Aux côtés de Jacques Lacan – Jacques-Alain MillerEn analyse
Lacan le Style – François Regnault
Le tourbillon de la vie – Lilia Mahjoub
Inoubliable ! – Patrick Valas
Apprendre à lire, ou le trajet d’une lettre – Éric LaurentVie quotidienne
À propos deLa Vie avec Lacan – Catherine Millot
Le Docteur Lacan au 5, rue de Lille – Gloria González
Le Docteur Lacan à Guitrancourt – Alicia, Jesús & Maïté Escobes
Le Docteur Lacan et son ami Jacques Aubert –Catherine Millot
Le Docteur Lacan et son libraire – Bernard ClavreuilPonctuations
Le Misfit et le Kairos – Barbara Cassin
Le discours de Vienne – Éric Marty
Sapere aude ! – Alain Grosrichard
Contre-légende – Nathalie Jaudel
Tableau – Paz CoronaRéférences
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Pour le 40e anniversaire de la mort de Lacan, Ornicar ? publie sous l’impulsion de Jacques-Alain Miller un hors-série, un recueil de manuscrits et de témoignages inédits, qui font vivre et palpiter comme jamais sa personne, ses concepts et ses mathèmes : Lacan Redivivus.
Ornicar ? présente au public un Lacan changé en lui-même par des témoignages personnels, qui ne le métamorphosent pas en saint de vitrail, mais tout de même le dédiabolisent.
On commémore la mort de Lacan, on célèbre son enseignement. Comme-est-mort Lacan, ça nous intéresse. Mais ce qui nous intéresse bien davantage, c’est Lacan redivivus, « revenu à la vie » le Jour de la Colère, à la surprise de la mort, de la nature et de l’opinion obscurantiste des woke.
À découvrir au fil de ce hors-série :
. des manuscrits de Jacques Lacan, dont le carnet où il notait ses rêves quand il était en analyse ; des correspondances illustres ; des présentations cliniques ; etc.
. un entretien décoiffant avec Jacques-Alain Miller sur ses rapports avec Lacan et avec ceux des psychanalystes qui, voici quarante ans, voulurent ostraciser celui qu’ils appelaient « le gendre » et le bannir de la psychanalyse.
. des témoignages de ce qu’il fut pour ses proches – le père, le grand-père, le beau-père, l’ami, l’amant –, pour ses analysants et pour son entourage.Samedi 5 février 2022, Jacques-Alain Miller, Christiane Alberti et Ève Miller-Rose (Navarin éditeur) présentaient Lacan Redividus à la librairie Mollat, à Bordeaux.
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Lacan, vivant
De retour d’une de ses conférences les plus lumineuses de la fin de son enseignement, Le phénomène lacanien, prononcée à Nice le 30 novembre 1974, Lacan fit une confidence aux auditeurs de son Séminaire : à Nice, on avait créé un attroupement pour venir assister au spectacle du phénomène Lacan, le grand analyste aux cigares tordus, aux tenues vestimentaires aussi extravagantes qu’exorbitantes, aux paroles tellement sibyllines qu’elles ne pouvaient être que charabia psy. Eh bien, à Nice, ils ne furent pas déçus, et Lacan non plus, qui eut l’immense surprise de répondre aux questions des néophytes venus l’écouter ce jour-là, et qui découvrirent, à leur corps défendant, que si phénomène il y avait bien eu, ce n’était pas celui de l’apparition d’un personnage haut en couleur, mais l’effet du discours analytique tel que Lacan le travaillait ces années-là, soit l’effet d’un enseignement visant à saisir pourquoi il y a des mots qui portent, et d’autres pas, et à serrer, toujours plus près du réel, la percussion du signifiant sur le corps.
D’une certaine façon, quarante-sept ans après cette conférence et quarante ans exactement après sa mort, la parution du dernier numéro d’Ornicar ? constitue en soi également un phénomène : d’abord par sa réussite éditoriale, que l’on doit aux efforts conjugués de Jacques-Alain Miller et Christiane Alberti, qui l’ont dirigée, et à Deborah Gutermann-Jacquet et France Jaigu à la rédaction. Tout, de l’épaisseur et la belle facture de ce volume imposant à la superbe couverture, aux textes et entretiens inédits comme aux archives publiées ici pour la première fois, apparaît en effet comme phénoménal : ainsi nous est-il offert de pénétrer dans l’intimité du jeune Lacan notant ses rêves de jeune marié, de découvrir que déjà l’élève du Collège Stanislas se faisait remarquer pour « sa diplomatie pour passer à côté du règlement » ! Mais le lecteur apercevra également à travers des échanges épistolaires avec les plus grands intellectuels du xxe siècle la place majeure qu’occupa Lacan le chercheur pour Michel Foucault aussi bien que Claude Lévi-Strauss ou Roman Jakobson ; quel analyste il fut, si attentif aux signifiants de l’autre dans les présentations cliniques, toujours disponible, aussi vigoureux que rigoureux dans son maniement du transfert pour ses analysants dont certains, devenus des piliers de l’École de la Cause freudienne, témoignent ici. Mais aussi quel père et grand-père à la présence incarnée, y compris dans l’épaisseur de son mystère pour ses proches, quel homme ne cédant jamais sur son désir pour ceux qui partagèrent sa vie quotidienne, et en particulier pour sa secrétaire, Gloria, qui l’accompagna dans les bons comme les mauvais jours, en dépit de tout.
Aussi, plus encore que le phénomène d’édition, ce qui frappe à parcourir l’ouvrage est précisément ce à quoi travailla avec acharnement Lacan toute sa vie, soit ce qui, de la parole à la lettre en passant par le signifiant, saisit. Car c’est bien d’une lecture saisissante dont il s’agit, non qu’elle serait la conséquence d’un véritable écrasement sous le portrait glorieux et pétrifié d’un homme mort, à l’existence exceptionnelle. Bien plutôt se dessine là un Lacan en « portrait chinois1Miller J.-A. & Alberti C. (dir.), Ornicar ? hors-série. Lacan Redivivus, Paris, Navarin, 2021, p. 451.» pour reprendre les mots de Nathalie Jaudel, dont les différents visages ne se résorbent pas dans le classicisme d’un tableau mais dont tous les traits convergent vers un même point de fuite pour faire surgir dans les mots, les siens comme ceux de ses compagnons de route, la ténacité, non d’un mondain attiré par les richesses matérielles, mais d’un infatigable chercheur, refusant d’être une idole, emporté par une l’énergie titanesque qu’il mit pour accomplir la tâche qui le tarauda toute sa vie, celle de « restaurer le soc tranchant de [s]la vérité2Lacan J., « Acte de fondation », 1964, Autres écrits, Paris, Seuil, 2001, p. 229.» freudienne et le dépasser par ses propres avancées, et notamment en se frottant à la question de l’institution analytique. Et peut-être est-ce là le plus émouvant, de découvrir par quels actes Lacan fonda puis a dissout son École précisément pour continuer à maintenir vivante, au-delà de sa mort, sa transmission, et notamment en s’appuyant sur les plus jeunes et non moins décidés, J.-A. Miller et Éric Laurent, au moment de l’appel à fonder l’École de la Cause freudienne. Que ce volume paraisse aujourd’hui, qu’il soit un tel succès éditorial et touche autant ses lecteurs témoigne bien que ces actes, Lacan les a véritablement réussis : Redivivus, en effet, revenu par la grâce de ce volume à la vie, mais surtout parce que la vive subversion du discours de Lacan nous travaille encore, nous travaille toujours, et qu’il nous échoit de le travailler.
- 1Miller J.-A. & Alberti C. (dir.), Ornicar ? hors-série. Lacan Redivivus, Paris, Navarin, 2021, p. 451.
- 2Lacan J., « Acte de fondation », 1964, Autres écrits, Paris, Seuil, 2001, p. 229.