« Tuer le mandarin1Lê L., Le complexe de Caliban, Paris, Christian Bourgeois éditeur, 2005, p. 51.» : c’est par un crime de la langue – sa langue natale, le vietnamien – que Linda Lê, qui nous a quitté le 9 mai dernier, présentait l’acte qui avait présidé à son écriture : le choix d’écrire des livres dans une langue étrangère, et uniquement dans cette langue, le français.
Née en 1963 à Dalat, au Viêtnam, Linda Lê partira en 1969 avec sa famille à Saïgon pour fuir la guerre. Elle y poursuivra sa scolarité dans un lycée français, où elle se découvre une passion pour la littérature française, sa structure, mais aussi ses sonorités, son chant.
À l’âge de quatorze ans, après la chute de Saïgon et la victoire du communisme, Linda Lê quitte le Viêtnam avec sa mère et sa sœur pour s’installer en France, laissant au pays le père qu’elle ne reverra jamais. Au souvenir de cet évènement douloureux s’ajoutera celui qui viendra hanter les épisodes hallucinatoires – dont elle ne fera pas secret dans ses romans – : quand, craignant la délation, elle décide de se débarrasser au plus vite de ses précieux livres de littérature française considérée comme « littérature dégénérée » par « les agents de purification culturelle2Lê L., Rencontres littéraires au Petit Palais, France Culture, le 17 octobre 2010 [lien désactivé].» de son pays. Au même moment, elle prendra la décision radicale de ne plus jamais parler sa langue natale.
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