L'Hebdo Blog, 316

« L’élangues » : le choix de l’intraduisible

Éditorial

05/11/2023
Martine Versel

Dans « Le dictionnaire des intraduisibles1Cassin B., Ce que les mots peuvent, Paris, Bouquins éditions, 2022.», la philosophe et philologue, Barbara Cassin rappelle qu’au XXe siècle la langue anglaise a rompu avec la langue philosophique, avec son héritage grec, en asséchant tout questionnement sur l’être. La langue anglaise s’est ainsi employée « à dégonfler les baudruches de la métaphysique2Ibid., p. 488.» pour s’énoncer désencombrée de ce jargon d’autant qu’elle est riche de ses particularités linguistiques, note B. Cassin. Elle serait la langue du common sense au plus près des expériences de la vie dont parle Wittgenstein, Austin ou bien Cavell. En revanche, Heidegger établissait un tout autre statut à la langue allemande. Il la haussait en haut du palmarès des meilleures langues philosophantes. On pourrait en déduire que les langues philosophiques exacerberaient les nombreuses considérations dont celles-ci sont l’objet. Or, c’est aussi généralisable aux langues naturelles. Rappelons à cet effet, la fameuse distinction que les Grecs opéraient entre logos/barbares. Ce mot grec bàrbaros est une onomatopée péjorative faisant entendre la sonorité rauque tel un grondement de tonnerre de celui qui ne parle pas le grec. Ce sont-là quelques exemples de la dimension imaginaire de la langue. Pour l’être parlant, il y a cette dimension imaginaire de la langue qui pousse à croire que parce qu’il en dispose, il la possède.

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  • 1
    Cassin B., Ce que les mots peuvent, Paris, Bouquins éditions, 2022.
  • 2
    Ibid., p. 488.