Dans le cadre du Campus de l’ECF, Bénédicte Jullien, psychanalyste, membre de l’ECF et de l’AMP, dépliera des concepts psychanalytiques en lien avec le thème.
Argument
À l’époque d’un capitalisme libéral décomplexéest apparue la figure du « sujet autonome », autodéterminé, performatif et prétendument responsable de ses choix. Mais dans le même temps, résonnent les voix des victimes, plus nombreuses à mesure qu’elles prennent la parole. Pourquoi le premier semble faire fi des conséquences de ses actes alors que les secondes ont pu se sentir coupable de ce qui leur arrivent ?
Les avancées scientifiques et technologiques sont autant de promesses de bonheur que de catastrophes. Elles facilitent les échanges mais réduisent le sujet à un devoir de jouissance : consommer ou être interchangeable. Les réseaux sociaux s’en font l’écho : une parole déferle jusqu’à l’outrage.
Dans ce contexte, la perte de sens et l’angoisse de l’avenir s’amplifient et aucun discours ne parvient à pacifier l’égarement qu’elles engendrent.
L’éthique psychanalytique peut-elle offrir une boussole ? Entre l’affirmation de « l’insondable décision de l’être1Lacan J., « Propos sur la causalité psychique », Écrits, Paris, Seuil, 1966, p. 77. » et la thèse selon laquelle « de notre position de sujet, nous sommes toujours responsables2Lacan J., « La science et la vérité », ibid., p. 858. », Lacan parie sur la possibilité du sujet de répondre de ses paroles et de ses actes. « Il m’est impossible […] de n’être ni la cause ni la conséquence de rien, […] de devoir n’être rien qu’innocent3Kertész I., Être sans destin, Paris, Actes Sud, 1998, p. 357. », écrit Imre Kertész.
À distance des accusations et des disculpations, le sujet qui s’engage dans une analyse découvre la part de responsabilité qu’il a prise dans ce qu’il vit, non pas tant dans l’événement en lui-même qui peut être pure contingence, mais dans la façon dont il s’en fait responsable, c’est-à-dire y répond.