Argument
Lacan s’est très tôt penché sur l’énigme du passage à l’acte criminel. En 1950 il prononcera l’aphorisme qui constitue une véritable une réponse éthique à la question de la criminologie : « si la psychanalyse irréalise le crime, elle ne déshumanise pas le criminel.1Lacan J., « Introduction théorique aux fonctions de la psychanalyse en criminologie », Ecrits, Paris, Seuil, 1966, p. 129.»
Avec cet autre aphorisme : « Rien n’est plus humain que le crime2Miller J-A, « Rien n’est plus humain que le crime », Mental, n°21, septembre 2008, p. 7-13.», Jacques-Alain Miller va inclure le crime dans le concept de parlêtre qui définit l’inconscient du dernier Lacan, et souligner le caractère paradoxal propre à la nature humaine. S’inscrivant dans l’universalité des lois du langage, le passage à l’acte criminel demeure en fait indissociable de « l’impasse de la parole […] elle-même dépendante de la fonction du signifiant dans les conséquences et les effets3Biagi-Chai F., « Lacan criminologue », La Cause freudienne, n°79, 2011, p.89.». Il concerne donc au plus haut point la psychanalyse.
Dans le cadre du cycle de conférences « Institutions : un lieu pour un lien », le bureau de Nîmes-Avignon de l’ACF en Voie domitienne s’est engagé à poursuivre la réflexion initialisée précédemment sur « ce qui fait violence » en se penchant cette année sur le passage à l’acte criminel et sur sa fonction. La référence au livre4Biagi-Chai F., Le cas Landru à la lumière de la psychanalyse, Editions Imago, Paris, 2007. de Francesca Biagi-Chai, psychiatre, psychanalyste, membre de l’ECF et de l’AMP, s’est alors présentée comme une évidence, tant la démarche qu’elle propose se soustrait à toute interprétation imaginaire et se démarque de la propension actuelle à vouloir découvrir le sens, la vérité (toute la vérité) sur la motivation de l’auteur du passage à l’acte.
C’est au contraire, parce qu’il y a le réel et que « la vérité ne peut être que contredite5Biagi-Chai F., « Crime », La Cause du désir, n°100, 2018, p.148.», que Francesca Biagi-Chai préconise une « action concrète », qui permette de retrouver, au travers du dialogue avec l’auteur du passage à l’acte criminel, « la singularité du sujet, si dissociée, objectivée, violente ou cruelle soit-elle6Biagi-Chai F., « Lacan criminologue », La Cause freudienne, n°79, 2011, p.89.».
Durant cette matinée, nous entendrons Francesca Biagi-Chai, qui, forte de son expérience psychiatrique et clinique d’orientation lacanienne, nous fera part de ses avancées théoriques en la matière, et répondra aux questions d’un cartel au travail sur la lecture de son livre, constitué de membres du bureau de Nîmes-Avignon de l’ACF-Vd avec Stéphanie Morel, psychanalyste, membre de l’ECF et de l’AMP comme plus-un. Des questions seront également issues d’un groupe de professionnelles travaillant en institution et réunies autour de Caroline Nissan, psychanalyste, membre de l’ECF et de l’AMP.