l'École de la Cause freudienne >

COMMUNIQUÉ DE LA PRÉSIDENTE DE L’ECF

Paris, le 10 janvier 2024

Bien chers collègues, 

          Au nom du nouveau Conseil de l’École de la Cause freudienne, je vous adresse mes meilleurs vœux pour l’année à venir.

Je saisis cette occasion pour revenir sur cet usage des vœux de bonne année dont Lacan nous livrait sa lecture il y a 56 ans jour pour jour. Le 10 janvier 1968, il commence la séance de son Séminaire en présentant ses vœux avant de relever que le début de l’année est un recommencement. De même que le cycle de la Lune finit pour recommencer, de même, l’année s’achève pour reprendre, note-t-il. Toutefois, si la Lune disparaît avant de réapparaître – trouvant dans cette réapparition sa raison d’être déclarée nouvelle –, l’année s’achève et recommence à un moment qui peut sembler arbitraire. À la différence de la Lune, l’année n’a pas de commencement assignable. Lacan note en ce sens que le commencement de l’année est donc placé à cette date par un acte. 

Il n’est qu’à considérer les déplacements de ce commencement dans l’histoire pour s’en convaincre. Ainsi par exemple, le calendrier basé sur les cycles lunaires, qui aurait été mis au point par Numa Pompilius, faisait commencer l’année en mars en signe de dévotion au dieu de la guerre. C’est Jules César qui acte le début de l’année en janvier en référence à Janus dont l’un des visages regarde vers l’arrière tandis que l’autre regarde vers l’avant. Et le calendrier julien est cette fois fondé sur le cycle solaire et non plus lunaire. En France, ce n’est qu’en 1564, avec l’édit de Roussillon, que l’année commence le 1er janvier – date d’ailleurs de longtemps reconnue par l’Église qui fait débuter l’ère chrétienne le jour de la circoncision de Jésus, soit huit jours après sa naissance. 

Le passage d’un calendrier fondé sur le cycle lunaire à un calendrier fondé sur le cycle solaire et qui connaîtra quelques nécessaires ajustements, participe sans doute à faire dire à Lacan qu’à partir du moment où on le saisit comme cycle, il y a un signifiant qui ne colle pas tout à fait avec le réel. Et c’est là aussi qu’intervient l’acte qui fixe le commencement de l’année à telle date plutôt qu’à telle autre.

Mais ces considérations portent Lacan au-delà : puisque c’est par un acte que l’année commence, il peut définir l’acte lui-même comme lié à la détermination du commencement et tout à fait spécialement là où il y a besoin d’en faire un, parce que, précisément, il n’y en a pas. L’acte se trouve ici défini comme ce qui institue un vrai commencement. 

C’est dans ce champ de l’acte qu’entre ainsi la présentation de nos vœux en début d’année, note-t-il encore. Il s’agit certes d’un très laïc résidu d’acte si on le compare à ceux qui étaient jadis en usage, mais en mettant la focale sur ce résidu, Lacan nous indique que même de la tradition, du nouveau peut émerger pour peu qu’on sache interpréter la nécessité dont elle procède et la façon dont le signifiant y tente de s’ajuster au réel.

À l’heure de ce re-commencement de l’année, je vous souhaite donc du nouveau.

Je tiens à remercier vivement Éric Zuliani pour son travail comme président de l’École durant les deux années passées. Et je souhaite à chacun, et en particulier aux responsables des publications de notre École, à ceux des commissions du Conseil et du Directoire et à leurs équipes qui prennent leurs fonctions en ce début d’année, un travail qui nous porte à d’heureuses conséquences. 

Bien à vous,

Anaëlle Lebovits-Quenehen

Présidente de l’École de la Cause freudienne