Le texte de Jacques-Alain Miller, « Clinique ironique1Miller J.-A., « Clinique ironique », La Cause freudienne, n° 23, février 1993. », est une référence centrale pour se repérer dans le thème mis au travail par les J52. En effet, tant la conception du langage qu’il y propose que le programme de rénovation de la clinique analytique des psychoses qu’il y déploie, en faisant passer la séparation non plus entre psychose et névrose, mais entre paranoïa et schizophrénie (soit entre métaphore ou non) nous éclairent à ce sujet.
Ce texte est ainsi central pour la critique de la théorie du langage des auteurs logiciens anglo-saxons qui comporte et prépare la théorie de la psychose ordinaire et la théorie de la nomination dont J.-A. Miller fera le point de passage au dernier enseignement de Lacan.
De fait, dans celui-ci, Lacan cherche à aller au-delà de l’inconscient freudien et d’un certain platonisme du signifiant, cela notamment avec les concepts de parlêtre, de jouissance et d’Un-corps, qui prennent place dans une nouvelle aire, plus matérialiste et aristotélicienne, où sont considérés le signifiant tout seul et ses effets de jouissance sur le corps : « le nom propre est aussi, dans le tout dernier enseignement de Lacan, une catégorie, une partie du discours privilégiée, dans la mesure où ce serait le signifiant à quoi correspondrait précisément Un- corps. La consistance de l’Un-corps2Cf. Miller J.-A., « L’orientation lacanienne. Le tout dernier Lacan », enseignement prononcé dans le cadre du département de psychanalyse de l’université Paris 8, cours du 14 mars 2007, inédit.».
Dans la « Note sur l’enfant3Lacan J., « Note sur l’enfant », Autres écrits, Paris, Seuil, 2001, p. 375.», Lacan nous permettait déjà de distinguer en quoi l’enfant comme symptôme du couple parental relève de l’articulation signifiante comme effet du langage, tandis que l’enfant pris dans le fantasme de la mère relève du signifiant tout seul dans son lien avec la jouissance, comme produit du langage.
Dans notre accueil des dires de l’enfant il s’agit pour l’analyste d’entendre la singularité de son bien-dire, que ce soit au niveau de son roman familial où il est aliéné, au niveau du fantasme comme signification figée, ou au niveau de l’identité de jouissance. L’analyste, lorsqu’il écoute, prête l’oreille aux jeux des signifiants, plus qu’au sens des paroles du sujet. Il n’écoute pas en tant que linguiste ou spécialiste de la sémantique, ni comme grammairien. Il prête l’oreille au sens-joui4Cf. Lacan J., « Télévision », Autres écrits, op. cit., p. 520. qui se fait entendre dans ce que le parlêtre a de plus singulier, soit son identité de jouissance par-delà les signifiants des identifications qui l’ont constitué comme sujet de l’inconscient.